Texte et photos : Rick MacLeod Farley
Le gîte de Kamestastin a été construit par les Innu, bien résolus à reprendre leurs affaires en mains après des décennies de contrôle extérieur. Au milieu des années 1990, cette communauté autochtone du Labrador a créé la « Tshikapisk Foundation » (« Fondation Tshikapisk ») dans le but de faire renaître et de perpétuer les pratiques et les savoirs innus. Depuis 2000, la Fondation s’est surtout investie dans la construction de cet établissement écotouristique qui célèbre la culture innue. L’ouverture du gîte est prévue pour juillet 2006.
En avril 2003, j’ai eu la possibilité de me rendre par voie de terre à Kamestastin, au plus profond du Labrador sub-arctique, pendant que le gîte était encore en construction. J’arrivai à la nuit tombée et marchai, pour l’atteindre, guidé par mes hôtes innus, sur des congères de neige épaisses de plusieurs mètres. J’ai dormi paisiblement cette nuit-là, réchauffé par le poêle à bois…
Je me souviendrai toujours de ma première journée au gîte. Par un matin splendide, j’ouvris la porte de ma cabane sur un panorama époustouflant : une vaste étendue, couverte de glace et de neige, scintillait dans le soleil. Le lac ! Tout autour se dressaient des collines majestueuses, couvertes de massifs de sapins et cernées par des parois rocheuses nues, battues par les vents. Les jours qui suivirent furent riches d’enseignements : j’appris à connaître mes hôtes Innu et les défis qu’ils devaient relever dans le monde moderne, l’importance aussi que ce lieu revêtait depuis toujours à leurs yeux.
Le gîte de Kamestastin est situé à la croisée des routes migratoires du plus grand troupeau de caribous du monde, appelé le « George River Caribou Herd » (Troupeau de caribous de la rivière George). Ces animaux sont partout et l’on peut observer des sites archéologiques (certains datant de plus de 5 000 ans) à proximité des voies autrefois empruntées par les caribous pour traverser les lacs. J’ai vu des campements innus récents et appris que les bois suspendus aux arbres étaient là pour honorer le dieu des caribous, Kanapanakasikueu.
Tout au long de l’année, on peut aussi observer autour du gîte des ours noirs, des élans, des loups gris et des renards. Beaucoup d’oiseaux habitent la région, y compris le lagopède, le harfang des neiges et des espèces menacées comme le faucon gerfaut et l’arlequin plongeur. Avec un diamètre de 28 kilomètres, le lac Kamestastin est l’un des trente plus grands cratères de météorite au monde.
De nombreux programmes s’offrent aux visiteurs dont le Caribou Migration Viewing (Observation des caribous en migration) et les Innu Country Custom Excursions (Excursions à la carte en pays Innu). L’observation des caribous en déplacement se fait chaque année pendant les deux premières semaines de mai et les deux dernières semaines d’octobre, qui sont des périodes clés. Toutefois, les caribous suivent leur propre agenda : ils peuvent passer à proximité du gîte au cours d’une période de 6 semaines au printemps et en automne. Les camps Innu sont décorés de bois de caribou pour honoerer le dieu des caribous ou Kanapanakasikueu.
Localisation
Dans l’Ouest du Labrador, à la frontière avec le Québec. Les moyens d’accès sont assurés par le gîte, généralement par un vol partant de la Happy Valley (Goose Bay, Labrador) qui passe par Twin Otter. Le gîte a sa propre piste d’atterrissage. D’autres vols charters peuvent être réservés de Nain (côte est du Labrador) ou de Schefferville, au Québec.
Contact
Anthony Jenkinson ou Napes Ashini
P.O. Box 412, Sheshashit, NL A0P 1MO Canada
Tél. : 709-497-8189
Fax : 709-497-8157
Courriel : shaputuan@nf.aibn.com
Courriel : www.tshikapisk.ca
Langue : anglais
Rick McLeod Farley ;
Email : rickmf@macfar.ca
Autre contact_ Roger Wylde, Executive Director
Quebec Aboriginal Tourism Corporation (Staq)
50, Blvd Bastien, suite 200,
Wendake, P.Q.
G0V 4V0 Canada
Tél. : 418.843.5030
Fax : 418.843.7164
Appel gratuit au Canada : 1.877.698.7827 *
Langue : anglais ou français
Le site doit être pleinement opérationnel à partir de juillet 2006. Des réservations spéciales peuvent être faites avant son ouverture, si la demande est faite bien à l’avance.
Informations culturelles
Bien connues pour le combat qu’ils ont mené contre les vols d’essais militaires à basse altitude, les communautés Innu du Labrador se libèrent aujourd’hui du joug de la colonisation, qui leur a imposé la scolarisation et la sédentarisation et le contrôle d’un gouvernement éxtérieur. À travers ses entreprises touristiques, la Fondation Tshikapsik cherche à consolider les fondements de la culture innue, tout en la faisant connaître à des visiteurs venus du monde entier. Le gîte redonne espoir aux communautés de Natuashish (anciennement Inlet) et de Sheshatshit, et notamment aux jeunes, en leur procurant des emplois, sur place.
Références bibliographiques
Samson, Colin, A Way of Life that does not exist : Canada and the Extinguishment of the Innu, Verso, Londres, 2003 (Colin Samson est professeur de sociologie et d’études américaines à l’université d’Essex, en Angleterre) – « Rend compte de l’ampleur des catastrophes qu’ont vécues les Innu… Malgré d’importantes pertes en terres et en hommes … les Innu ont résisté aux épreuves grâce à une foi inébranlable dans leur caractère singulier et à leur attachement à la terre. »
Séjour recommandé
Parmi les Excursions à la carte en pays Innu, vous pourrez opter pour les circuits « Innu Culture » (Culture Innu) ou « Innu Adventure » (Aventure Innu). Les circuits « Culture Innu » mettent l’accent sur les activités terrestres et lacustres traditionnelles, et incluent notamment des fouilles archéologiques. Les circuits « Aventures Innu » privilégient les activités de plein air : observation des animaux sauvages, canoë, kayak, ski de fond et randonnée – à pied ou en raquettes traditionnelles de forme circulaire et fabriquées à la main par les Innu.
Des expéditions en pays Innu peuvent aussi être organisées pour les groupes, sur demande et à l’avance. Incursions dans le Grand nord pour les plus endurcis, ces expéditions (avec guides) vous mèneront plus loin en moto des neiges, en ski de fond, à pied, en canoë ou en kayak.
Le gîte accueille des groupes de 4 à 12 personnes. Il y a cinq cabanes et une chambre double. Le prix (par jour et par personne) des programmes (« Observation des caribous en migration » et « Excursions à la carte en pays Innu » par exemple couvrent tous les repas, les services et les activités. Ils varient entre 400 et 600 CA$ (ou de 330 à 500 US$) pour des durées de sept jours. Ces prix incluent les vols charter depuis Goose Bay. Le tarif journalier baisse pour des programmes de 14 jours ou pour les personnes qui se rendent au gîte par leurs propres moyens.
Organisme de soutien.
_ Constitué en 1998, le premier conseil de la Fondation Tshikapisk était composé d’anciens Innu, de porte-parole et défenseurs de la cause innue et de Robin Hanbury-Tenison, président de Survival International. Les projets de la Fondation sont définis en fonction des enjeux politiques de la communauté, ils recyclent les bénéfices dans des projets de développement communautaire, des programmes d’aide pour la jeunesse et de redynamisation de la culture innue. Avec l’ouverture du gîte de Kamestastin, la Fondation ajoutera à ses activités culturelles et sociales une dimension économique. Elle estime qu’il ne peut y avoir autosuffisance et revitalisation sociale des communautés que si celles-ci lancent d’elles-mêmes des initiatives économiques qui reposent sur leur propre culture et la mettent en valeur.